FR – Dans le salon de mon enfance trônaient quatre volumes en reliure de cuir rehaussé or, les ouvrages ouverts révélaient les reproductions colorées de chefs-d’oeuvres des musées du Louvre et du Prado – des photogravures imprimées en 1914. La collection appartenait à mon grand-père, également peintre, qui l’avait donnée à sa fille, ma mère. Dans ces lourds livres je découvrais l’Art et la beauté, premières sensibilités esthétiques au creux des pages jaunies, couleurs approximatives des photogravures. Je ne comprenais pas ce que je voyais mais c’était beau, surtout le plis des vêtements, les tissus, les ombrages, le détail des dentelles, les armes et les armures, les motifs des nappes et des rideaux, la torsade des muscles, le clair-obscur. Maman est décédée l’année dernière me laissant les volumes, le lien coupé me fit voir que le désir d’être artiste était pour lui plaire, comme à son papa, et pour dé-plaire au mien. A présent il me fallait tuer ces images pour leur redonner vie, y découper les sujets, laissant vacants les amats de matières et d’éclairages, les trous dans la peinture donnaient accès aux images dessous, tunnels d’une oeuvre à l’autre, couches sur couches, une archéologie, un deuil d’images. Pourquoi faisons-nous encore aujourd’hui, des images? Des images qui ne montrerait rien, où il n’y aurait rien à voir.
EN – In my childhood’s living room presided four volumes in leather and gold and when the thick books opened the eye would meet with colored reproductions of the masterworks of classical paintings from the Louvre and Prado museums. The edition dated from 1914 and belonged to my grand-father, who gave it to his daughter, my mother. In them I disvored the existence of Art, of painting and beauty, my esthetic sensibility took shape in those yellowed pages and fainted colours. Last year mother passed away leaving the golden volumes to me. In order to give life to these objects I had to kill them, it was the only way to keep them alive. I understood that my desire to be an artist was how I pleased my mother, it was how I showed her that I was on her side, and also how i dis-pleased the father. Went back to the four books with a renewed vison and started to cut out the subjects of the old masters, the faces and bodies, leaving only the stuff, the matter, the lights and shadows of the background decorium, drapes, curtains, cloth. Holes in pictures leading to the picture bellow making a tunnel through time, revealing layer after layer a way or mourning. Why do i want to make pictures now in the present and why do we need to make pictures still now – what kind of pictures – pictures that don’t show – pictures with nothing to see.